sommes perdus. Non, monsieur le duc, nous ne vous battrons pas, car, tout faible que vous êtes ou que vous prétendez être, vous nous rendriez les coups avec usure ; non, voici toute la vérité, on vous voit revenir avec joie.
— Oui, dit la folle comtesse, et, en honneur de ce retour, on tire les boîtes, les fusées ; et vous le savez, duc…
— Je ne sais rien, madame, dit le maréchal avec une naïveté d’enfant.
— Eh bien, dans les feux d’artifice, il y a toujours quelque perruque roussie par les étincelles, quelques chapeaux crevés par les baguettes.
Le duc porta la main à sa perruque et regarda son chapeau.
— C’est cela, c’est cela, dit la comtesse ; mais vous nous revenez, c’est au mieux ; quant à moi, je suis, comme vous le disait M. d’Aiguillon, d’une gaieté folle ; savez-vous pourquoi ?
— Comtesse, comtesse, vous allez encore me dire quelque méchanceté ?
— Oui, mais ce sera la dernière.
— Eh bien, dites.
— Je suis gaie, maréchal, parce que votre retour m’annonce le beau temps.
Richelieu s’inclina.
— Oui, continua la comtesse, vous êtes comme les oiseaux poétiques qui prédisent le calme ; comment appelle-t-on ces oiseaux-là, monsieur d’Aiguillon, vous qui faites des vers ?
— Des alcyons, madame.
— Justement ! Ah ! maréchal, vous ne vous fâcherez pas, j’espère ; je vous compare à un oiseau qui a un bien joli nom.
— Je me fâcherai d’autant moins, madame, fit Richelieu avec sa petite grimace qui annonçait la satisfaction, et la satisfaction de Richelieu présageait toujours quelque bonne noirceur, je me fâcherai d’autant moins que la comparaison est exacte.
— Voyez-vous !
— Oui, j’apporte de bonnes, d’excellentes nouvelles.
— Ah ! fit la comtesse.