Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/214

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garçon, qui était poli après tout… Je le récompenserai autrement.

— Ne cherchez pas Gilbert, murmura Philippe.

— Pourquoi ?… Il doit être dans les jardins ; je le ferai mander, d’ailleurs.

— Non ! non ! vous perdriez un temps précieux… Moi, au contraire, en traversant les allées, je le rencontrerai… je lui parlerai… je le paierai…

— Alors, c’est bien, s’il en est ainsi.

— Oui, adieu ; à ce soir.

Philippe baisa la main de la jeune fille, qui se jeta dans ses bras. Il comprima jusqu’aux battements de son cœur dans cette molle étreinte, et, sans tarder, il partit pour Paris, où le carrosse le déposa devant la porte du petit hôtel de la rue Coq-Héron.

Philippe savait bien rencontrer là son père. Le vieillard, depuis sa rupture étrange avec Richelieu, n’avait plus trouvé la vie supportable à Versailles, et il cherchait, comme tous les esprits surabondants d’activité, à tromper les torpeurs du moral par les agitations du déplacement.

Or, le baron, quand Philippe sonna au guichet de la porte cochère, arpentait avec d’effroyables jurons le petit jardin de l’hôtel et la cour attenant à ce jardin.

Il tressaillit au bruit de la sonnette et vint ouvrir lui-même.

Comme il n’attendait personne, cette visite imprévue lui apportait une espérance : le malheureux, dans sa chute, se rattrapait à toute branche.

Il reçut donc Philippe avec le sentiment d’un dépit et d’une curiosité insaisissables.

Mais il n’eut pas plus tôt regardé le visage de son interlocuteur, que cette sombre pâleur, cette raideur des lignes et la crispation de la bouche lui glacèrent la source de questions qu’il s’apprêtait à ouvrir.

— Vous ! dit-il seulement, et par quel hasard ?

— J’aurai l’honneur de vous expliquer cela, monsieur, dit Philippe.