Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/244

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

amenait les promeneurs aux Champs-Élysées, où Paris flottait entre les premiers brouillards du soir et les premiers feux de ce jour factice qui lui fait une journée de vingt-quatre heures.

Le jeune homme, en conséquence de la résolution prise, alla droit à la porte du petit hôtel de la rue Coq-Héron, et frappa sans hésiter un instant.

Le silence seul lui répondit.

Il redoubla les coups de marteau, mais sans que le dixième obtînt plus de succès que le premier.

Alors cette dernière ressource, celle sur laquelle il avait compté, lui échappa. Fou de rage, mordant ses mains, pour punir son corps de ce qu’il souffrait moins que son âme, Gilbert tourna brusquement la rue, poussa le ressort de la porte de Rousseau, et monta l’escalier.

Le mouchoir qui renfermait les trente billets de caisse, attachait aussi la clef du grenier.

Gilbert s’y précipita comme il se fût précipité dans la Seine si elle eût coulé à cet endroit.

Puis, comme la soirée était belle et que les nuages floconneux se jouaient dans l’azur du ciel, comme une douce senteur montait des tilleuls et des marronniers dans le crépuscule de la nuit, comme la chauve-souris venait battre de ses ailes silencieuses les vitres du petit châssis, Gilbert, rappelé à la vie par toutes ces sensations, s’approcha de la lucarne, et, voyant blanchir au milieu des arbres le pavillon du jardin où jadis il avait retrouvé Andrée qu’il croyait à jamais perdue, il sentit son cœur se briser et tomba presque évanoui sur l’appui de la gouttière, les yeux perdus dans une vague et stupide contemplation.