Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/163

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ture du théâtre s’approcha ; enfin sept heures sonnèrent, et, à ce dernier appel, Hoffmann, enlevé comme malgré lui, descendit tout courant son escalier, et s’élança dans la direction de la rue Saint-Martin.

Cette fois, en moins d’un quart d’heure, cette fois, sans avoir besoin de demander son chemin à personne, cette fois, comme si un guide invisible lui eût montré sa route, en moins de dix minutes il arriva à la porte de l’Opéra.

Mais, chose singulière ! cette porte, comme deux jours auparavant, n’était pas encombrée de spectateurs, soit qu’un incident inconnu d’Hoffmann eût rendu le spectacle moins attrayant, soit que les spectateurs fussent déjà dans l’intérieur du théâtre.

Hoffmann jeta son écu de six livres à la buraliste, reçut son carton et s’élança dans la salle.

Mais l’aspect de la salle était bien changé. D’abord elle n’était qu’à moitié pleine ; puis, à la place de ces femmes charmantes, de ces hommes élégants qu’il avait cru revoir, il ne vit que des femmes en casaquin et des hommes en carmagnole ; pas de bijoux, pas de fleurs, pas de seins nus s’enflant et se désenflant sous cette atmosphère voluptueuse des théâtres aristocratiques ; des bonnets ronds et des bonnets rouges, le tout orné d’énormes cocardes nationales ; des couleurs sombres dans les vêtemens, un nuage triste sur les figures ; puis, des deux côtés de la salle, deux bustes hideux, deux têtes grimaçant, l’une le rire, l’autre la douleur, les bustes de Voltaire et de Marat enfin.

Enfin, à l’avant-scène, un trou à peine éclairé, une ou-