Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/162

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

deux choses : c’était, d’un côté, la fantastique danseuse, et, de l’autre côté, le non moins fantastique docteur. Il y avait entre ces deux êtres une telle corrélation, qu’Hoffmann ne comprenait pas l’un sans l’autre. Aussi n’était-ce pas, pendant cette hallucination qui lui offrait Arsène toujours bondissant sur le théâtre, l’orchestre qui bruissait à ses oreilles ; non, c’était le petit chantonnement du docteur, c’était le petit tambourinement de ses doigts sur la tabatière d’ébène ; puis, de temps en temps, un éclair passait devant ses yeux, l’aveuglant d’étincelles jaillissantes ; c’était le double rayon qui s’élançait de la tabatière du docteur et du collier de la danseuse ; c’était l’attraction sympathique de cette guillotine de diamans avec cette tête de mort en diamans ; c’était enfin la fixité des yeux du médecin qui semblaient à sa volonté attirer et repousser la charmante danseuse, comme l’œil du serpent attire et repousse l’oiseau qu’il fascine.

Vingt fois, cent fois, mille fois, l’idée s’était présentée à Hoffmann de retourner à l’Opéra ; mais, tant que l’heure n’était pas venue, Hoffmann s’était bien promis de ne pas céder à la tentation ; d’ailleurs, cette tentation, il l’avait combattue de toutes manières, en ayant recours à son médaillon d’abord, puis ensuite en essayant d’écrire à Antonia ; mais le portrait d’Antonia semblait avoir pris un visage si triste, qu’Hoffmann refermait le médaillon presque aussitôt qu’il l’avait ouvert ; mais les premières lignes de chaque lettre qu’il commençait étaient si embarrassées, qu’il avait déchiré dix lettres avant d’être au tiers de la première page.

Enfin ce fameux surlendemain s’écoula ; enfin l’ouver-