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dit Nodier, c’est que l’écrevisse n’est pas un poisson, c’est que l’écrevisse n’est pas rouge, c’est que l’écrevisse ne marche pas à reculons… le reste est parfait.

J’oublie de dire qu’au milieu de tout cela, Marie Nodier s’était mariée, était devenue madame Ménessier ; mais ce mariage n’avait absolument rien changé à la vie de l’Arsenal. Jules était un ami à tous : on le voyait venir depuis longtemps dans la maison ; il y demeura au lieu d’y venir, voilà tout.

Je me trompe, il y eut un grand sacrifice accompli : Nodier vendit sa bibliothèque ; Nodier aimait ses livres, mais il adorait Marie.

Il faut dire une chose aussi, c’est que personne ne savait faire la réputation d’un livre comme Nodier. Voulait-il vendre ou faire vendre un livre, il le glorifiait par un article : avec ce qu’il découvrait dedans, il en faisait un exemplaire unique. Je me rappelle l’histoire d’un volume intitulé le zombi du grand Pérou, que Nodier prétendit être imprimé aux colonies, et dont il détruisit l’édition de son autorité privée ; le livre valait cinq francs, il monta à cent écus.

Quatre fois Nodier vendit ses livres, mais il gardait toujours un certain fonds, un noyau précieux à l’aide duquel, au bout de deux ou trois ans, il avait reconstruit sa bibliothèque.

Un jour, toutes ces charmantes fêtes s’interrompirent. Depuis un mois ou deux, Nodier était plus souffreteux, plus plaintif. Au reste, l’habitude qu’on avait d’entendre plaindre Nodier faisait qu’on n’attachait pas une grande attention à ses plaintes. C’est qu’avec le caractère de No-