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L’heure était venue, Marie envoya chercher le curé de Saint-Paul.

Nodier se confessa. Pauvre Nodier ! il devait y avoir bien des péchés dans sa vie, mais il n’y avait certes pas une faute.

La confession achevée, toute la famille entra.

Nodier était dans une alcôve sombre, d’où il étendait les bras sur sa femme, sur sa fille et sur ses petits-enfans.

Derrière la famille étaient les domestiques.

Derrière les domestiques, la bibliothèque, c’est-à-dire ces amis qui ne changent jamais, les livres.

Le curé dit à haute voix les prières auxquelles Nodier répondit aussi à haute voix, en homme familier avec la liturgie chrétienne. Puis, les prières finies, il embrassa tout le monde, rassura chacun sur son état, affirma qu’il se sentait encore de la vie pour un jour ou deux, surtout si on le laissait dormir pendant quelques heures.

On laissa Nodier seul, et il dormit cinq heures.

Le 26 janvier au soir, c’est-à-dire la veille de sa mort, la fièvre augmenta et produisit un peu de délire ; vers minuit, il ne reconnaissait personne, sa bouche prononça des paroles sans suite, dans lesquelles on distingua les noms de Tacite et de Fénelon.

Vers deux heures, la mort commençait de frapper à la porte : Nodier fut secoué par une crise violente, sa fille était penchée sur son chevet et lui tendait une tasse pleine d’une potion calmante ; il ouvrit les yeux, regarda Marie et la reconnut à ses larmes ; alors il prit la tasse de ses mains et but avec avidité le breuvage qu’elle contenait.

— Tu as trouvé cela bon ? demanda Marie.