Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/55

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larges et belles où pointe l’herbe, sa fontaine mythologique, sa promenade ombragée d’un double rang d’acacias qui la traverse d’un bout à l’autre ; pour juger, dis-je, combien la vie serait douce et facile dans un semblable paradis, si parfois les passions amoureuses ou politiques n’y venaient mettre un pistolet à la main de Werther ou un poignard à la main de Sand.

Il y a surtout une place qui a un caractère tout particulier, c’est celle où s’élèvent à la fois l’église et le théâtre.

Église et théâtre ont dû être bâtis en même temps, probablement par le même architecte ; probablement encore vers le milieu de l’autre siècle, quand les caprices d’une favorite influaient sur l’art à ce point que tout un côté de l’art prenait son nom, depuis l’église jusqu’à la petite maison, depuis la statue de bronze de dix coudées jusqu’à la figurine en porcelaine de Saxe.

L’église et le théâtre de Mannheim sont donc dans le style pompadour.

L’église a deux niches extérieures : dans l’une de ces deux niches est une Minerve, et dans l’autre est une Hébé.

La porte du théâtre est surmontée de deux sphinx. Ces deux sphinx représentent, l’un la Comédie, l’autre la Tragédie.

Le premier de ces deux sphinx tient sous sa patte un masque, le second un poignard. Tous deux sont coiffés en racine droite avec un chignon poudré, ce qui ajoute merveilleusement à leur caractère égyptien.

Au reste, toute la place, maisons contournées, arbres frisés, murailles festonnées, est dans le même caractère, et forme un ensemble des plus réjouissans.