Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/69

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quoique aucun objet matériel ne fût là pour la lui rappeler, c’était la prédiction du vieil officier.

Aussi, sans regret aucun, s’habilla-t-il comme de coutume ; et ; prenant ses quatre mille thalers sous son bras, alla-t-il les porter lui-même à la diligence de Kœnigsberg, après avoir pris le soin cependant de serrer les mille thalers restants dans son tiroir.

Puis, comme il était convenu, on s’en souvient, que les deux amis partiraient le même soir pour la France, Hoffmann se mit à faire ses préparatifs de voyage.

Tout en allant, tout en venant, tout en époussetant un habit, en pliant une chemise, en assortissant deux mouchoirs, Hoffmann jeta les yeux dans la rue et demeura dans la pose où il était.

Une jeune fille de seize à dix-sept ans, charmante, étrangère bien certainement à la ville de Mannheim, puisque Hoffmann ne la connaissait pas, venait de l’extrémité opposée de la rue et s’acheminait vers l’église.

Hoffmann, dans ses rêves de poëte, de peintre et de musicien, n’avait jamais rien vu de pareil.

C’était quelque chose qui dépassait non-seulement tout ce qu’il avait vu, mais encore tout ce qu’il espérait voir.

Et cependant, à la distance où il était, il ne voyait qu’un ravissant ensemble : les détails lui échappaient.

La jeune fille était accompagnée d’une vieille servante.

Toutes deux montèrent lentement les marches de l’église des Jésuites, et disparurent sous le portail.

Hoffmann laissa sa malle à moitié faite, un habit lie-de-vin à moitié battu, sa redingote à brandebourgs à moitié pliée, et resta immobile derrière son rideau.