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IV

MAÎTRE GOTTLIEB MURR


Ce fut le chef d’orchestre qui vint ouvrir en personne à Hoffmann.

Hoffmann n’avait jamais vu maître Gottlieb, et cependant il le reconnut.

Cet homme, tout grotesque qu’il était, ne pouvait être qu’un artiste, et même un grand artiste.

C’était un petit vieillard de cinquante-cinq à soixante ans, ayant une jambe tordue, et cependant ne boitant pas trop de cette jambe, qui ressemblait à un tire-bouchon. Tout en marchant, ou plutôt tout en sautillant, et son sautillement ressemblait fort à celui d’un hochequeue, tout en sautillant et en devançant les gens qu’il introduisait chez lui, il s’arrêtait, faisant une pirouette sur sa jambe torse, ce qui lui donnait l’air d’enfoncer une vrille dans la terre, et continuait son chemin.

Tout en le suivant, Hoffmann l’examinait et gravait dans son esprit un de ces fantastiques et merveilleux portraits dont il nous a donné, dans ses œuvres, une si complète galerie.

Le visage du vieillard était enthousiaste, fin et spirituel à la fois, recouvert d’une peau parcheminée, mouchetée