Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/79

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cela ne doute de rien, ces jeunes gens ! Il faudrait toute la vie d’un homme, de deux hommes, de trois hommes, pour être seulement l’un ou l’autre ! et ils sont l’un et l’autre !

Et il fit un tour sur lui-même, levant les bras au ciel et ayant l’air d’enfoncer dans le parquet le tire-bouchon de sa jambe droite.

Puis, après la pirouette achevée s’arrêtant devant Hoffmann :

— Voyons, jeune présomptueux, dit-il, qu’as-tu fait en composition ?

— Mais des sonates, des chants sacrés, des quintetti.

— Des sonates après Sébastien Bach ! des chants sacrés après Pergolèse ! des quintetti après François-Joseph Haydn ! Ah ! jeunesse ! jeunesse !

Puis, avec un sentiment de profonde pitié :

— Et comme instrumentiste, continua-t-il, comme instrumentiste, de quel instrument jouez-vous ?

— De tous à peu près, depuis le rebec jusqu’au clavecin, depuis la viole d’amour jusqu’au théorbe ; mais l’instrument dont je me suis particulièrement occupé, c’est le violon.

— En vérité, dit maître Gottlieb d’un air railleur, en vérité tu lui as fait cet honneur-là, au violon ! C’est, ma foi ! bien heureux pour lui, pauvre violon ! Mais, malheureux ! ajouta-t-il en revenant vers Hoffmann en sautillant sur une seule jambe pour aller plus vite, sais-tu ce que c’est que le violon ? Le violon ! et maître Gottlieb balança son corps sur cette seule jambe dont nous avons parlé, l’autre restant en l’air comme celle d’une grue ; le violon ! mais c’est le plus difficile de tous les instrumens. Le violon