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Page:Dumas - La Princesse Flora (1871).djvu/12

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la princesse flora

Me croiras-tu, ma chérie, si je te dis que, dans cette masse de têtes, dans cette voie lactée d’yeux gris, bleus, noirs, marron, pas une seule physionomie ne m’a souri comme je l’eusse désiré ? Pas un seul regard n’a brillé d’une vraie sympathie pour moi, et, dans ces yeux, aucuns qui fussent dignes d’occuper un instant mon esprit et ma pensée. « Comme il y a peu de cavaliers !… » disions-nous à Moscou. « Comme il y a peu d’hommes !… » disais-je à Peterhoff. La vulgarité avait passé son linceul de glace sur tous ces visages. C’est en vain que tu étudieras tous les traits de leur physionomie, soit dans l’ensemble, soit dans les détails, tu ne pourras deviner ni à quel peuple, ni à quelle époque, ni à quelle race appartiennent tous ces gens-là. Dans leur sourire, tu ne trouveras pas l’expression ; dans leurs paroles, tu ne trouveras pas la pensée ; sous leurs crachats, tu ne trouveras pas le cœur ; c’est un tableau recouvert d’un magnifique vernis, dont le prix est énorme, mais dont personne ne peut dire le sujet. Pendant toute cette soirée, je n’ai pas entendu une seule conversation, une seule phrase, un seul