Marguerite écouta en souriant ces paroles pleines de charme, et suivit des yeux cette action pleine de grâces ; puis, penchant sa belle tête rêveuse sur sa main brûlante :
— Vous m’aimez ? dit-elle.
— Oh ! Madame ! plus que ma vie, plus que mon salut, plus que tout ; mais vous, vous… vous ne m’aimez pas.
— Pauvre fou ! murmura-t-elle.
— Eh ! oui, Madame, s’écria La Mole toujours à ses pieds, je vous ai dit que je l’étais.
— La première affaire de votre vie est donc votre amour, cher La Mole !
— C’est la seule, Madame, c’est l’unique.
— Eh bien ! soit ; je ne ferai de tout le reste qu’un accessoire de cet amour. Vous m’aimez, vous voulez demeurer près de moi ?
— Ma seule prière à Dieu est qu’il ne m’éloigne jamais de vous.
— Eh bien ! vous ne me quitterez pas ; j’ai besoin de vous, La Mole.
— Vous avez besoin de moi ? le soleil a besoin du ver luisant ?
— Si je vous dis que je vous aime, me serez-vous entièrement dévoué ?
— Eh ! ne le suis-je point déjà, Madame, et tout entier ?
— Oui ; mais vous doutez encore, Dieu me pardonne !
— Oh ! j’ai tort, je suis ingrat, ou plutôt, comme je vous l’ai dit et comme vous l’avez répété, je suis un fou. Mais pourquoi M. de Mouy était-il chez vous ce soir ? pourquoi l’ai-je vu ce matin chez M. le duc d’Alençon ? pourquoi ce manteau cerise, cette plume blanche, cette affectation d’imiter ma tournure ?… Ah ! Madame, ce n’est pas vous que je soupçonne, c’est votre frère.
— Malheureux ! dit Marguerite, malheureux qui croit que le duc François pousse la complaisance jusqu’à introduire un soupirant chez sa sœur ! Insensé qui se dit jaloux et qui n’a pas deviné ! Savez-vous, La Mole, que le duc d’Alençon demain vous tuerait de sa propre épée s’il savait que vous êtes là, ce soir, à mes genoux, et qu’au lieu de vous chasser de cette place, je vous dis : Restez là comme vous êtes, La Mole ; car je vous aime, mon beau gentilhomme, entendez-