Page:Dumas - La Tulipe noire (1892).djvu/212

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jour je m’assieds et je travaille près d’elle, car depuis qu’elle est dans ma chambre, je ne quitte plus ma chambre.

— Vous avez raison, Rosa, c’est votre dot, vous savez ?

— Oui, et grâce à elle je pourrai épouser un jeune homme de vingt-six ou vingt-huit ans que j’aimerai.

— Taisez-vous, méchante.

Et Cornélius parvint à saisir les doigts de la jeune fille, ce qui fit, sinon changer de conversation, du moins succéder le silence au dialogue.

Ce soir-là Cornélius fut le plus heureux des hommes. Rosa lui laissa sa main tant qu’il lui plut de la garder, et il parla tulipe tout à son aise.

À partir de ce moment, chaque jour amena un progrès dans la tulipe et dans l’amour des deux jeunes gens. Une fois c’était les feuilles qui s’étaient ouvertes, l’autre fois c’était la fleur elle-même qui s’était nouée.

À cette nouvelle la joie de Cornélius fut grande, et ses questions se succédèrent avec une rapidité qui témoignait de leur importance.

— Nouée, s’écria Cornélius, elle est nouée !

— Elle est nouée, répéta Rosa.

Cornélius chancela de joie et fut forcé de se retenir au guichet.

— Ah mon Dieu ! s’exclama-t-il.

Puis revenant à Rosa :

— L’ovale est-il régulier, le cylindre est-il plein, les pointes sont-elles bien vertes ?

— L’ovale a près d’un pouce et s’effile comme une aiguille, le cylindre gonfle ses flancs, les pointes sont prêtes à s’entr’ouvrir.