Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/240

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Croisier, Desaix et Zaionczck s’élancèrent.

Le reste des assistans demeura à sa place.

— Il y a un précepte de votre religion, reprit le petit Homme Rouge, qui dit que les premiers seront les derniers ; permettez-moi de retourner ce précepte, et de dire que les derniers seront les premiers.

Et il s’avança vers Croisier qui n’était qu’aide de camp. Croisier lui tendit la main.

Le petit Homme Rouge l’examiner et secoua la tête.

— On t’appelle brave parmi les braves, dit-il, et cela est vrai. Cependant il y aura un jour, une heure, un moment où ton courage t’abandonnera, et tu paieras ce moment de la vie.

Croisier se recula, le sourire du dédain sur les lèvres.

Le petit Homme Rouge s’avança vers Desaix ; le jeune général n’attendit point sa demande et lui tendit la main.

— Salut, dit le sorcier, au vainqueur de Kehl, qui, avant quinze jours, aura encore rattaché son nom à une autre victoire. Trois journées te feront immortel ; mais défie-toi du mois de juin, et crains le curé de Marengo.

— Tu es bien obscur, sorcier mon ami, dit en riant Desaix ; et combien demandes-tu de temps pour que tes prédictions se réalisent ?

— Deux ans, répondit le prophète.

— À la bonne heure ! répondit Desaix ; allons, ce n’est pas trop long, et l’on peut attendre.

Le petit Homme Rouge s’avança vers Zaionczek qui lui tendit la main à son tour.

— Enfin, dit-il, voilà une de ces mains comme j’aime à en voir, un de ces horoscopes comme j’aime à les dire ; un avenir glorieux qu’il m’est doux de rattacher à un glorieux passé.

— Diable ! dit Zaionczek, voilà un début qui promet.

— Et qui tiendra, dit le petit Homme Rouge.

— Oui, si quelque balle ou quelque boulet ne l’emporte pas avec lui.

— En effet, dit le prophète, tu as du malheur au feu, et, si je compte bien, tu as déjà reçu sept blessures.