Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/248

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Après la capitulation signée avec l’Angleterre pour l’évacuation de l’Égypte, capitulation à laquelle Zaionczek, lui troisième, s’était opposé, le patriote polonais revint en France. En 1805, il commanda une division au camp de Boulogne, puis à l’armée d’Allemagne ; puis enfin en 1806, les Polonais s’étant repris à cet espoir, tant de fois déçu, de retrouver leur indépendance, ils accoururent de toutes les parties de la terre où ils étaient dispersés. En effet, le traité de Tilsitt rassembla quelques débris de la vieille Pologne, dont on forma le duché de Varsovie. Zaionczek alors eut part aux dotations impériales, et un domaine lui fut assigné dans le palatinat de Kalisz.

Mais ce n’était pas encore là cette haute fortune qui lui était promise par les prédictions égyptiennes ; Napoléon n’avait fait pour Zaionczek que ce qu’il avait fait pour cent autres, et un domaine n’était pas une vice-royauté.

Cependant, il faut le dire, un tel bonheur avait accompagné Zaionczek de 1798 à 1811, que ce privilégié de la mitraille, qui ne pouvait pas paraître au feu sans être blessé, n’avait pas reçu une égratignure depuis treize ans.

Il en résultait que, sans en rien dire à personne, Zaionczek avait la plus grande confiance dans son talisman et ne le quittait pas.

La guerre de Russie fut déclarée ; ou forma trois divisions polonaises : la première sous les ordres de Poniatowski, la seconde sous les ordres de Zaionczek, la troisième sous les ordres de Dombrowski.

Zaionczek assista aux combats de Witepsk, de Smolensk et de la Moscowa ; partout le même bonheur l’accompagna : les balles trouaient ses habits, la mitraille sifflait à ses oreilles, les boulets soulevaient la terre sous les pieds de ses chevaux, Zaionczek semblait invulnérable.

Puis vint la retraite.

Zaionczek assista à toutes les phases de cette retraite ; il est vrai que ses soldats, mieux habitués que les nôtres à cet hiver russe qui est presque leur hiver, soutinrent le froid, le dénuement et la faim mieux que nous. Zaionczek donna malgré ses soixante ans, car l’homme de Damanhour s’était