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Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/266

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— Vous vous trompez, monseigneur, lui répondis-je. Tout au contraire des autres princes royaux, Votre Altesse a des amis et point de parti.

Le duc d’Orléans sourit, et, sur un signe de son père, le comte de Paris me tendit sa petite main, que je baisai.

— Que souhaitez-vous à mon fils ? me dit alors le prince.

— D’être roi le plus tard possible, monseigneur.

— Vous avez raison. C’est un vilain métier !

— Ce n’est point pour cela, monseigneur, repris-je ; mais c’est qu’il ne peut être roi qu’à la mort de Votre Altesse.

— Oh ! je puis mourir maintenant, dit-il avec cette expression de mélancolie qui revenait si souvent sur son visage et dans sa voix. Avec la mère qu’il a, il sera élevé comme si j’y étais. Puis, étendant la main vers la chambre de la duchesse, comme s’il eût pu deviner à travers la muraille la place où elle était :

— C’est un quine que j’ai gagné à la loterie, me dit-il.

Le fait est qu’il était impossible, je crois, d’avoir à la fois plus de respect, plus de tendresse, plus de vénération et plus de confiance que le duc d’Orléans n’en avait pour la duchesse. C’est qu’il avait retrouvé en elle une partie des hautes qualités qu’il avait lui-même. Quand il parlait d’elle, et il en parlait souvent, son bonheur intime débordait de son cœur comme l’eau déborde d’un vase trop plein.

Revenons à Florence.

Je portai le soir même les trois lettres mortuaires à l’ambassade ; je trouvai monsieur Belloc tout en larmes ; il ne savait encore rien d’officiel ; mais comme la Gazette de Gênes est ordinairement le journal le mieux informé de l’Italie, il croyait à la réalité de la nouvelle.

Je rentrai donc chez moi, ayant fait un pas de plus dans cette affreuse certitude.

J’avais écrit à la reine que je n’avais éprouvé que deux grandes douleurs dans ma vie : c’était vrai. J’ajouterai que cette douleur que j’avais éprouvée en perdant ma mère, le prince royal l’avait tendrement partagée. Voilà comment les noms de ces deux aimés de mon cœur, que je vois maintenant