Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/27

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pour la Toscane, Odessa pour Florence ; c’est une jeune et belle femme de grand air, à qui ses robes de brocart d’or et ses rivières de diamans donnent l’aspect d’une châtelaine du moyen-âge. Aussi je ne sais rien de plus en harmonie avec ce beau palais, tout tapissé de Titiens, de Raphaëls et de Van-Dycks, que la maîtresse, qui semble s’être détachée d’une de leurs toiles pour en faire les honneurs.

Je me rappellerai toute ma vie l’impression que je ressentis lorsque, du milieu de ces salons tout resplendissans de lumière, je jetai les yeux sur l’Arno tout flamboyant d’illuminations. Les Italiens ont un art particulier pour disposer les flambeaux qui éclairent leurs fêtes. Le fleuve, tout chargé de gondoles pavoisées glissant au son des instrumens, et portant de joyeux convives qui se renvoyaient des santés d’une barque à l’autre, était littéralement entre deux murs de flamme. Partout où l’on apercevait l’eau, l’eau réfléchissait le feu : l’Arno, comme le Pactole, semblait rouler des flots d’or.

Le feu d’artifice tiré, chacun prit congé du prince. À neuf heures et demie, il y avait bal au Casino, et, comme la cour venait à ce bal, il était convenable que l’aristocratie florentine fût là pour la recevoir. Je pris à mon grand regret congé, non pas du prince et de la princesse que j’allais retrouver, mais de leur palais, que je me promis bien de revoir. Au reste, la séparation ne devait pas être longue : nous y dînions le lendemain.

Comme on était venu chez le prince Corsini en toilette de cour, on n’eut que cent pas à faire pour se trouver au Casino. J’entends par toilette de cour cravate blanche, croix, crachats et cordons. Quant à l’uniforme, le duc ne l’exige pas, même pour les bals au palais Pitti. Il n’est de rigueur qu’aux réceptions du premier jour de l’an et aux concerts du carême.

Il était impossible de trouver un contraste plus parfait que celui qui nous attendait. Rien de plus riche que le palais Corsini, rien de plus simple que le Casino. C’est un appartement donnant d’un côté sur le quai, de l’autre sur la place de la Trinité, et composé de quatre ou cinq chambres