Page:Dumas - La Villa Palmieri.djvu/37

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jugèrent pas sa description indigne de leur plume ; il est vrai que quand les historiens ont à écrire la vie des tyrans, les trois quarts de leur ouvrage sont presque toujours destinés à des récits de fêtes.

Cette mascarade se composait de cinq quadrilles de douze personnes chacun ; le premier quadrille représentait douze princes indiens ; le second, douze Florentins vêtus à la manière du treizième siècle ; le troisième, douze chefs grecs : le quatrième, douze empereurs ; et enfin le cinquième, douze pèlerins. On avait gardé celui-ci pour le dernier, comme étant le plus riche. En effet, chaque pèlerin était revêtu d’une robe de toile d’or dont le petit manteau était tout garni de coquilles d’argent au fond desquelles étaient incrustées de véritables perles.

La même année se célébra au même palais le mariage d’Isabelle, cette autre fille de Cosme si ardemment et si singulièrement aimée par son père, et qui avait failli, en s’endormant dans la grande salle du Palais-Vieux, coûter la vie à Vasari. Celle-là aussi était marquée d’un signe funeste et devait être assassinée. Son mari était Paul Giordano Orsini, duc de Bracciano. On se rappelle qu’il l’étrangla avec une corde cachée sous l’oreiller conjugal, après une partie de chasse dans sa villa de Ceretto.

Ce fut vers cette époque que, pour rendre le palais Pitti de plus en plus digne des grands événemens qui s’y passaient, le grand-duc Cosme fit faire par l’Ammanato cette superbe cour dans laquelle, selon l’orgueilleuse prévision de son premier propriétaire, devait danser le palais Strozzi. En effet, cette cour, à elle seule, est sur chaque face de trois pieds plus large que la face correspondante du palais qu’elle était destinée à enfermer comme un écrin de granit.

Éléonore de Tolède, sous le nom de laquelle Cosme avait acheté le palais Pitti, mourut à son tour, on sait comment, à la suite de la mort de ses deux fils tués, l’un par son frère, l’autre par son père. Cosme chercha à se consoler de ce triple malheur dans un nouvel amour ; et, las du pouvoir, fatigué de la politique, il abandonna à son fils François le gouvernement de ses États, toujours prêt à y remettre la main