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gnes, des fontaines coulèrent dans ses vallées ; enfin, en 1555, c’est-à-dire six ans après qu’il était devenu la propriété de Cosme le Grand, le palais Pitti, qui avait gardé son premier nom, se trouva en état de recevoir les députés siennois qui apportaient à Cosme le traité de capitulation de leur ville.

C’était une grande affaire pour Cosme que la soumission, de Sienne, cette éternelle rivale artistique, commerciale et politique de Florence. Sienne disputait à Florence la renaissance de la peinture ; Sienne avait son dôme de marbre rouge et noir, qui balançait le chef-d’œuvre de Brunelleschi ; Sienne avait gagné la fameuse bataille de Monteaperto, qui avait mis Florence à deux doigts de sa perte ; Sienne, enfin, gardait encore dans son palais populaire le Caroccio de Florence, trophée de cette grande défaite. Mais tout ce passé disparaissait devant le fait présent : Sienne courbait son front dans la poussière ; Sienne déposait aux pieds du grand-duc sa couronne murale ; Sienne, de reine, devenait esclave, la république se faisait province ; et grâce à cette adjonction de territoire, au milieu de la nouvelle formation des États européens qui commençait à s’organiser, la Toscane, atteignait presque au rang de puissance secondaire.

Aussi y eut-il de grandes fêtes au palais Pitti à propos de la capitulation de Sienne.

Trois ans après, Cosme, qui était dans sa période de bonheur, célébra au palais Pitti le mariage de sa fille Lucrèce avec le prince Alfonse d’Est, fils aîné du duc de Ferrare.

Ce fut cette Lucrèce dont nous avons déjà parlé à propos du Palais-Vieux, et dont, au bout de trois ans, on apprit la mort. Les historiens dirent qu’elle avait succombé à une fièvre putride. Le peuple, avec cet instinct de vérité qui le trompe si rarement, raconta que son mari l’avait tuée dans un mouvement de jalousie. La tradition populaire l’emporta sur le récit des historiens.

Ce mariage, qui terminait les disputes de préséance entre les maisons d’Est et de Médicis, avait cependant été célébré sous de riches auspices : de grands bals avaient été donnés à cette occasion au palais Pitti, et, dans une seule soirée, il y avait en une mascarade si magnifique que les historiens ne