Page:Dumas - La salle d'armes 1 Pauline, Dumont, 1838.djvu/252

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serviteur basané, à qui je ne pouvais communiquer mes volontés que par des signes auxquels, du reste, il obéissait avec une promptitude et une intelligence qui donnaient encore quelque chose de plus fantastique à ce repas étrange. Plusieurs fois j’eus envie de lui parler, quoique je susse qu’il ne pourrait pas me comprendre ; mais, comme les enfans qui n’osent crier dans les ténèbres, j’avais peur d’entendre le son de ma propre voix. Lorsqu’il eut servi le dessert, je lui fis signe d’aller me faire un grand feu dans ma chambre ; la flamme du foyer est la compagnie de ceux qui n’en ont pas ; d’ailleurs je comptais ne me coucher que le plus tard possible, car je me sentais une terreur à laquelle je n’avais pas songé pendant la journée, et qui était venue avec les ténèbres

Lorsque je me trouvai seule dans cette grande salle à manger, ma terreur s’augmenta : il me semblait voir s’agiter les rideaux blancs qui pendaient devant les fenêtres, pareils à des linceuls ; cependant ce n’était pas la crainte des morts qui m’agitait : les moines