prétentions comme marin, et je me rappelle que tu as fait ton apprentissage entre le pont des Tuileries et le pont de la Concorde, dans une embarcation au pavillon d’Amérique.
— Oui, continua Alfred en souriant ; mais cette fois ma prétention faillit m’être fatale : d’abord tout alla bien ; j’avais une petite barque de pêcheur à une seule voile, que je pouvais manœuvrer du gouvernail ; le vent venait du Havre et me faisait glisser sur la mer à peine agitée avec une rapidité vraiment merveilleuse. Je fis ainsi à peu près huit ou dix lieues dans l’espace de trois heures ; puis tout-à-coup le vent tomba, et l’océan devint calme comme un miroir. J’étais justement en face de l’embouchure de l’Orne : j’avais à ma droite le raz de Langrune et les rochers de Lyon, et à ma gauche les ruines d’une espèce d’abbaye attenante au château de Burcy ; c’était un paysage tout composé ; je n’avais qu’à copier pour faire un tableau. J’abattis ma voile et je me mis à l’ouvrage.