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PAULINE

J’étais tellement occupé de mon dessin que je ne saurais dire depuis combien de temps je travaillais lorsque je sentis passer sur mon visage une de ces brises chaudes qui annoncent l’approche d’un orage : en même temps la mer changea de couleur, et de verte qu’elle était devint gris de cendre. Je me retournai vers le large : un éclair sillonnait le ciel couvert de nuages si noirs et si pressés, qu’il sembla fendre une chaîne de montagnes ; je jugeai qu’il n’y avait pas un instant à perdre : le vent, comme je l’avais espéré en venant le matin, avait tourné avec le soleil ; je hissai ma petite voile et je mis le cap sur Trouville en serrant la côte afin de m’y faire échouer en cas de danger. Mais je n’avais pas fait un quart de lieue que je vis ma voile fasier contre le mât ; j’abattis aussitôt l’un et l’autre, car je me défiais de ce calme apparent. En effet, au bout d’un instant, plusieurs courans se croisèrent, la mer commença à clapoter, un coup de tonnerre se fit entendre ; c’était un avertissement à ne pas mépri-