Le parlementaire regagna les rangs des miliciens, et la fusillade recommença.
La nuit fut fatale aux assiégeans. Pascal, qui voyait ses munitions s’épuiser, ne tirait qu’à coup sûr et recommandait à ses compagnons d’en faire autant. Les miliciens perdirent encore une vingtaine d’hommes. Plusieurs fois les chefs avaient voulu les faire monter à l’assaut ; mais la perspective qui les attendait dans ce cas, et que leur avait énergiquement dépeinte Tommaselli, les maintint toujours à distance, et ni promesses ni menaces ne parvinrent à les décider à cet acte de courage, qu’ils appelaient, eux, un acte de folie.
Enfin, le matin, vers six heures, le parlementaire reparut une troisième fois : il offrait grâce entière, complète, irrévocable, aux quatre compagnons de Pascal Bruno ; quant à lui, il n’y avait rien de changé à son avenir : c’était toujours la potence.
Les compagnons de Pascal voulaient tirer sur le parlementaire, mais Pascal les arrêta d’un geste impérieux.
— J’accepte, dit-il.
— Que fais-tu ? s’écrièrent les autres.
— Je vous sauve la vie, dit Bruno.
— Mais toi ? reprirent les autres.
— Moi, dit Bruno en riant, ne savez-vous point que je me transporte où je veux, que je me fais invisible à ma volonté, et que je suis toujours invulnérable ? Moi, je sortirai de prison, et dans quinze jours je vous aurai rejoints dans la montagne.
— Parole d’honneur ? demandèrent les compagnons de Bruno.
— Parole d’honneur ! répondit celui-ci.
— Alors c’est autre chose, dirent ils, fais comme tu voudras.
Bruno reparut à la fenêtre.
— Ainsi, tu acceptes ? lui demanda le parlementaire.
— Oui, mais à une condition.
— Laquelle ?
— C’est qu’un de vos chefs me servira d’otage ici même et que je ne le relâcherai que lorsque je verrai mes quatre amis parfaitement libres dans la campagne.