Page:Dumas - Le Capitaine Aréna.djvu/202

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vu qu’entre sa condamnation et son supplice une demi-heure seulement lui était accordée. Il se promenait à grands pas dans sa chambre, quand le lieutenant Francesco Froyo, rapporteur de la commission, entra : il venait prier Murat, au nom de ses collègues, de comparaître au tribunal, ne fût-ce qu’un instant ; mais Murat renouvela son refus. Alors Francesco Froyo lui demanda quels étaient son nom, son âge et le lieu de sa naissance.

A cette question, Murat se retourna, et avec une expression de hauteur impossible à décrire :

— Je suis, dit-il, Joachim-Napoléon, roi des Deux-Siciles, né à la Bastide-Fortunière, et l’histoire ajoutera : assassiné au Pizzo. Maintenant que vous savez ce que vous voulez savoir, je vous ordonne de sortir.

Le rapporteur obéit.

Cinq minutes après, le général Nunziante entra ; il venait à son tour supplier Murat de paraître devant la commission, mais il fut inébranlable.

Cinq heures s’écoulèrent pendant lesquelles Murat resta enfermé seul et sans que personne fût introduit près de lui ; puis sa porte se rouvrit, et le procureur royal La Camera entra dans sa chambre, tenant d’une main le jugement de la commission et de l’autre la loi que Murat avait rendue lui-même contre les bandits, et en vertu de laquelle il avait été jugé. Murat était assis ; il devina que c’était sa condamnation qu’on lui apportait : il se leva, et, s’adressant d’une voix ferme au procureur royal : Lisez, monsieur, lui dit-il, je vous écoute.

Le procureur royal lut alors le jugement : Murat était condamné à l’unanimité moins une voix.

Cette lecture terminée : — Général, lui dit le procureur royal, j’espère que vous mourrez sans aucun sentiment de haine contre nous, et que vous ne vous en prendrez qu’à vous-même de la loi que vous avez faite.

— Monsieur, répondit Murat, j’avais fait cette loi pour des brigands et non pour des têtes couronnées.

— La loi est égale pour tous, monsieur, répondit le procureur royal.

— Cela peut être, dit Murat, lorsque cela est utile à cer-