Page:Dumas - Le Capitaine Aréna.djvu/260

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chine ambulante présenta à la fols une scène curieuse et horrible. Le lit était à la même place et s’était effondré sur lui-même ; l’hôte s’était réveillé et croyait dormir encore. Pendant cet étrange voyage, qu’elle ne soupçonnait pas elle-même, sa femme, imaginant seulement que le brasero glissait sous ses pieds, s’était baissée pour le retenir, et cette action avait sans doute été la seule et unique cause de sa chute sur le plancher ; mais dès qu’elle se fut relevée, dès qu’elle aperçut par l’ouverture de la porte des objets et des sites nouveaux, elle crut rêver elle-même, et faillit devenir folle. Quant à la nièce, abandonnée par sa tante au moment où celle-ci se baissait, elle courut éperdue vers la porte, qui, tombant au moment où elle en touchait le seuil, l’écrasa dans sa chute. Il en était de même des quatre voyageurs : avant qu’ils eussent eu le temps de se lever de leur place, ils étaient tués.

» Cent témoins oculaires de cette catastrophe inouïe existent encore au moment où j’écris ; le procès-verbal, d’où est tiré ce récit, fut dressé, quelque temps après, sur les lieux, et appuyé des déclarations de l’hôte et de sa femme, qui sans doute vivent encore.

» Les effets inouïs du tremblement de terre par bondissement ne se font pas sentir aux seuls édifices ; les phénomènes qu’ils produisent à l’égard des hommes mêmes ne sont ni moins forts ni moins étonnans ; et ce qu’il y a de plus étrange, c’est que cette particularité qui, en toute autre circonstance, est la cause immédiate de la perte des habitations et des hommes, devient parfois aussi la source du salut des unes et des autres.

» Un médecin de cette ville, monsieur Labbe-Tarverna, habitait une maison à deux étages, située dans la rue principale, près le couvent de Sainte-Catherine. Cette maison commença par trembler, elle vacilla ensuite, puis les murs, les toits, les planchers s’élevèrent, s’abaissèrent, et enfin furent jetés hors de leur place naturelle. Le médecin ne pouvant plus se tenir debout, veut fuir et tombe comme évanoui sur le plancher. Au milieu du bouleversement général, il cherche en vain la force nécessaire pour observer ce qui se passe autour de lui ; tout ce dont il se rappelle ensuite, c’est qu’il