Le lendemain, Joseph me réveilla dès le matin.
— Oh ! monsieur, en voilà une farce ! me dit-il en se plantant devant mon lit.
— Quelle farce ?
— Celle que votre tortue a faite.
— Comment ?
— Eh bien, croiriez-vous qu’elle est sortie de votre appartement, ça, je ne sais pas comment… qu’elle a descendu les trois étages, et qu’elle a été se mettre au frais dans le vivier du restaurateur ?
— Imbécile ! tu n’as pas deviné que c’était moi qui l’y avais portée ?
— Ah bon !… Vous avez fait là un beau coup, alors !
— Pourquoi cela ?
— Pourquoi ? Parce qu’elle a mangé la tanche, une tanche superbe qui pesait trois livres.
— Allez me chercher Gazelle, et apportez-moi des balances.
Pendant que Joseph exécutait cet ordre, j’allai à ma bibliothèque, j’ouvris mon Buffon à l’article tortue ; car je tenais à m’assurer si ce chélonien était ichtyophage, et je lus ce qui suit :
« Cette tortue d’eau douce, testudo aquarum dulcium, (c’était bien cela), aime surtout les marais et les eaux dormantes ; lorsqu’elle est dans une rivière ou dans un étang, alors elle attaque tous les poissons indistinctement, même les plus gros : elle les mord sous le ventre, les y blesse fortement, et, lorsqu’ils sont épuisés par la perte du sang, elle les dévore avec la plus grande avidité et ne laisse