devait suivre le trois-mâts le Zéphir pour se rendre de Nantes à New-York. Il résulta de cette savante manœuvre qu’un beau matin que le capitaine Pamphile, moitié assoupi, moitié éveillé, rêvait paresseusement dans son hamac, il fut tiré tout à coup de ce demi-sommeil par le cri du matelot en vigie qui signalait une voile.
Le capitaine Pamphile descendit de son hamac, sauta sur une longue-vue, et, sans prendre le temps de passer sa culotte, monta sur le pont de son bâtiment. Cette apparition tant soit peu mythologique aurait pu paraître inconvenante, peut-être, à bord d’un navire plus régulier que ne l’était la Roxelane ; mais il faut avouer, à la honte de l’équipage, que pas un de ses membres ne fit la moindre attention à cette notable infraction aux règles de la pudeur, tant ils étaient habitués aux bizarreries du capitaine ; quant à celui-ci, il traversa tranquillement le pont, grimpa sur le bastingage, enjamba quelques enfléchures des haubans, et, avec le même flegme que s’il eût été couvert d’un vêtement plus régulier, il se mit à examiner le navire en vue.
Au bout d’un instant, il n’avait plus de doute : c’était bien celui qu’il attendait ; aussi les ordres furent-ils immédiatement donnés pour placer les caronades sur leurs pivots et la pièce de huit sur son affût ; puis, voyant que ses recommandations allaient être exécutées avec la promptitude ordinaire, le capitaine Pamphile ordonna au timonier de tenir toujours la même route, et descendit dans sa cabine, afin de se présenter devant son confrère le capitaine Malvilain d’une manière plus décente.