Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/223

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çut l’azur du ciel par un trou de la voile de misaine de l’innocent et inoffensif trois-mâts, qui, croyant que le bâtiment qui tirait sur lui avait mal entendu ou mal compris, répéta de nouveau et plus distinctement encore que la première fois :

— Nous sommes le bâtiment de commerce le Zéphir, capitaine Malvilain, chargé d’eau-de-vie, et faisant route de Nantes à New-York.

— Ohé ! du trois-mâts ! répondit la Roxelane, mettez une embarcation à la mer, et envoyez-nous le capitaine.

Puis, voyant que le trois-mâts hésitait encore à obéir, et que la pièce de huit était rechargée :

— Feu ! dit une seconde fois le capitaine.

Et l’on vit le boulet égratigner le sommet des vagues et aller se loger en plein bois, à dix-huit pouces au-dessus de l’eau.

— Au nom du ciel, qui êtes-vous et que demandez-vous donc ? cria une voix rendue encore plus lamentable par l’effet du porte-voix.

— Ohé ! du trois-mâts ! répondit l’impassible Roxelane, mettez une embarcation à la mer, et envoyez-nous le capitaine.

Cette fois, que le brick eût bien ou mal compris, qu’il fût réellement sourd, ou qu’il fît semblant de l’être, il n’y avait pas moyen de ne pas obéir : un troisième boulet au-dessous de la flottaison, et le Zéphir était coulé ; aussi le malheureux capitaine ne se donna-t-il point le temps de répondre, mais il fut visible à tout œil un peu exercé que son équipage se mettait en devoir de descendre la chaloupe à la mer.