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ministre de l’instruction publique de diriger un de ces prochains dîners dans lequel on ne servirait aux convives que des plats parfaitement inconnus en Europe. Le ministre de l’instruction publique, confus de tant de bonté, refusa longtemps d’accepter une pareille offre ; mais sir Édouard Twomouth insista de telle façon et avec une si grande franchise, que Son Excellence finit par céder et invita tous ses collègues à cette solennité culinaire. En effet, au jour dit, le consul d’Édimbourg, qui avait donné la surveille à ses ordres pour les achats, arriva dès le matin, et, sans morgue, sans fierté, descendant à la cuisine, il se mit en chemise, au milieu des cuisiniers et des marmitons, qu’il dirigea comme s’il n’avait pas fait autre chose de toute sa vie. Puis, une demi-heure avant le dîner, il détacha la serviette qu’il avait nouée autour de ses reins, reprit son habit de consul, et, avec la simplicité du mérite réel, il entra au salon avec la même tranquillité que s’il descendait de son équipage.

C’est ce dîner, lequel fit révolution dans le cabinet anglais, qui fut comparé au festin de Balthasar par le Constitutionnel, dans un article foudroyant intitulé Perfide Albion.

Aussi, sir Édouard Twomouth souleva-t-il les plus vifs regrets dans le club gastronomique de Piccadilly, lorsque, impérieusement appelé par son devoir, il fut forcé de quitter Londres pour Édimbourg. Le docteur resta donc seul à Londres. Au bout de quelque temps, il notifia au corps diplomatique l’arrivée prochaine de son auguste maître, Son Altesse don Gusman y Pamphilos, ce qui