Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/260

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s’il y avait à Mosquitos un bottier de la couronne. Le consul répondit que beaucoup de demandes avaient été faites, mais qu’aucune n’avait encore été distinguée ; que, d’ailleurs, le cacique comptait soumissionner les charges, ce qui épargnerait toujours un grand embarras, attendu, que cette mesure déjouait toutes les brigues et tuait la vénalité, ce vice fondamental des gouvernements européens. Le bottier demanda à quel taux était cotée la charge de bottier de la couronne. Le docteur consulta ses registres et répondit que la charge de bottier de la couronne était cotée à deux cent cinquante livres sterling. Le bottier bondit de joie : c’était pour rien ! puis, tirant de sa poche cinq billets de banque qu’il présenta au consul, il le pria dès ce moment de le considérer comme seul et unique soumissionnaire, ce qui était d’autant plus juste qu’il y avait rempli la condition demandée, c’est-à-dire le paiement comptant et intégral de la soumission. Le consul trouva la demande si éminemment raisonnable, qu’il n’y répondit qu’en remplissant un brevet qu’il remit séance tenante au pétitionnaire, signé de sa main et revêtu du sceau de Son Altesse. Le bottier sortit du consulat sûr de sa fortune et enchanté d’avoir fait pour l’assurer un si mince sacrifice.

Dès lors il y eut queue au bureau du consulat ; au bottier succéda un tailleur, au tailleur un pharmacien ; au bout de huit jours, chaque branche de l’industrie, du commerce ou de l’art eut son représentant breveté. Puis ensuite vinrent les achats de grades et de titres ; le cacique fit des colonels et créa des barons, vendit des titres de no-