Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/27

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doigt l’extrémité de l’écaille ; puis aussitôt, se rejetant lestement en arrière, il se mit, sans perdre de vue l’objet qui le préoccupait, à danser joyeusement sur ses pieds et ses mains, accompagnant ce mouvement d’une espèce de chant de victoire qui lui était habituel toutes les fois que, par une difficulté vaincue ou un péril affronté, il croyait avoir à se féliciter de son habileté ou de son courage.

Cependant cette danse et ce chant s’interrompirent soudainement ; une idée nouvelle traversa le cerveau de Jacques, et parut absorber toutes ses facultés pensantes. Il regarda attentivement la tortue, à laquelle sa main, en la touchant, avait imprimé un mouvement d’oscillation que rendait plus prolongé la forme sphérique de son écaille, s’en approcha, marchant de côté comme un crabe ; puis, arrivé près d’elle, se leva sur ses pieds de derrière, l’enjamba comme fait un cavalier de son cheval, la regarda un instant se mouvoir entre ses deux jambes ; enfin, complètement rassuré, à ce qu’il paraît, par l’examen approfondi qu’il venait d’en faire, il s’assit sur ce siége mobile, et lui imprimant, sans que cependant ses pieds quittassent la terre, un mouvement rapide d’oscillation, il se balança joyeusement, se grattant le côté et clignant les yeux, gestes qui, pour ceux qui le connaissaient, étaient l’expression d’une joie indéfinissable.

Tout à coup Jacques poussa un cri perçant, fit un bond perpendiculaire de trois pieds, retomba sur les reins, et, s’élançant sur son échelle, alla se réfugier derrière la tête de Malagutti. Cette révolution était causée par Gazelle, qui, fatiguée d’un jeu dans lequel le plaisir n’était évidem-