Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 2.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

temps à un belvédère situé au haut de la maison, dans l’espérance de venir m’annoncer le premier une bonne nouvelle. J’ai su par lui l’entrée de ce navire.

— Et ce n’est pas le vôtre ?

— Non, c’est un navire bordelais, la Gironde ; il vient de l’Inde aussi, mais ce n’est pas le mien.

— Peut-être a-t-il eu connaissance du Pharaon et vous apporte-t-il quelque nouvelle.

— Faut-il que je vous le dise, Monsieur ! je crains presque autant d’apprendre des nouvelles de mon trois-mâts que de rester dans l’incertitude. L’incertitude c’est encore l’espérance.

Puis M. Morrel ajouta d’une voix sourde :

— Ce retard n’est pas naturel : le Pharaon est parti de Calcutta le 5 février, depuis plus d’un mois il devrait être ici.

— Qu’est cela, dit l’Anglais en prêtant l’oreille, et que veut dire ce bruit ?

— Ô mon Dieu ! mon Dieu ! s’écria Morrel pâlissant, qu’y a-t-il encore ?

En effet, il se faisait un grand bruit dans l’escalier ; on allait et on venait, on entendit même un cri de douleur.

Morrel se leva pour aller ouvrir la porte, mais les forces lui manquèrent et il retomba sur son fauteuil.

Les deux hommes restèrent en face l’un de l’autre, Morrel tremblant de tous ses membres, l’étranger le regardant avec une expression de profonde pitié. Le bruit avait cessé, mais cependant on eût dit que Morrel attendait quelque chose ; ce bruit avait une cause et devait avoir une suite.

Il sembla à l’étranger qu’on montait doucement l’escalier et que les pas, qui étaient ceux de plusieurs personnes, s’arrêtaient sur le palier.