Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 2.djvu/33

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

centre pour qu’un petit bâtiment du genre des spéronares pût y entrer et y demeurer caché. Alors, en suivant le fil des inductions, ce fil qu’aux mains de l’abbé Faria il avait vu guider l’esprit d’une façon si ingénieuse dans le dédale des probabilités, il songea que le cardinal Spada, dans son intérêt à ne pas être vu, avait abordé à cette crique, y avait caché son petit bâtiment, avait suivi la ligne indiquée par des entailles, et avait, à l’extrémité de cette ligne, enfoui son trésor.

C’était cette supposition qui avait ramené Dantès près du rocher circulaire.

Seulement cette chose inquiétait Edmond et bouleversait toutes les idées qu’il avait en dynamique : comment avait-on pu sans employer des forces considérables hisser ce rocher, qui pesait peut-être cinq ou six milliers, sur l’espèce de base où il reposait ?

Tout à coup une idée vint à Dantès. Au lieu de le faire monter, se dit-il, on l’aura fait descendre.

Et lui-même s’élança au-dessus du rocher, afin de chercher la place de sa base première.

En effet, bientôt il vit qu’une pente légère avait été pratiquée ; le rocher avait glissé sur sa base et était venu s’arrêter à l’endroit ; un autre rocher, gros comme une pierre de taille ordinaire, lui avait servi de cale ; des pierres et des cailloux avaient été soigneusement rajustés pour faire disparaître toute solution de continuité ; cette espèce de petit ouvrage en maçonnerie avait été recouvert de terre végétale, l’herbe y avait poussé, la mousse s’y était étendue, quelques semences de myrtes et de lentisques s’y étaient arrêtées, et le vieux rocher semblait soudé au sol.

Dantès enleva avec précaution la terre, et reconnut ou crut reconnaître tout cet ingénieux artifice.