Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/136

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Deux retinrent la pauvre Assunta, qui, ne pouvant croire à la possibilité d’un pareil crime, souriait à ceux qui allaient devenir ses bourreaux ; le troisième alla barricader portes et fenêtres, puis il revint, et tous trois réunis, étouffant les cris que la terreur lui arrachait devant ces préparatifs plus sérieux, approchèrent les pieds d’Assunta du brasier sur lequel ils comptaient pour lui faire avouer où était caché notre petit trésor ; mais, dans la lutte, le feu prit à ses vêtements : ils lâchèrent alors la patiente, pour ne pas être brûlés eux-mêmes. Tout en flammes elle courut à la porte, mais la porte était fermée.

Elle s’élança vers la fenêtre ; mais la fenêtre était barricadée. Alors la voisine entendit des cris affreux : c’était Assunta qui appelait au secours. Bientôt sa voix fut étouffée ; les cris devinrent des gémissements, et le lendemain, après une nuit de terreur et d’angoisses, quand la femme de Wasilio se hasarda de sortir de chez elle et fit ouvrir la porte de notre maison par le juge, on trouva Assunta à moitié brûlée, mais respirant encore, les armoires forcées, l’argent disparu. Quant à Benedetto, il avait quitté Rogliano pour n’y plus revenir ; depuis ce jour je ne l’ai pas revu, et je n’ai pas même entendu parler de lui.

— Ce fut, reprit Bertuccio, après avoir appris ces tristes nouvelles, que j’allai à Votre Excellence. Je n’avais plus à vous parler de Benedetto, puisqu’il avait disparu, ni de ma sœur, puisqu’elle était morte.

— Et qu’avez-vous pensé de cet événement ? demanda Monte-Cristo.

— Que c’était le châtiment du crime que j’avais commis, répondit Bertuccio. Ah ! ces Villefort, c’était une race maudite !