Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/135

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sur lesquelles Votre Excellence eut la bonté de me prendre à son service. Maintenant, je le demande avec orgueil à Votre Excellence, a-t-elle jamais eu à se plaindre de moi ?

— Non, répondit le comte ; et, je le confesse avec plaisir, vous êtes un bon serviteur, Bertuccio, quoique vous manquiez de confiance.

— Moi, monsieur le comte !

— Oui, vous. Comment se fait-il que vous ayez une sœur et un fils adoptif, et que, cependant vous ne m’ayez jamais parlé ni de l’une ni de l’autre !

— Hélas ! Excellence, c’est qu’il me reste à vous dire la partie la plus triste de ma vie. Je partis pour la Corse. J’avais hâte, vous le comprenez bien, de revoir et de consoler ma pauvre sœur ; mais quand j’arrivai à Rogliano, je trouvai la maison en deuil ; il y avait eu une scène horrible et dont les voisins gardent encore le souvenir ! Ma pauvre sœur, selon mes conseils, résistait aux exigences de Benedetto, qui, à chaque instant, voulait se faire donner tout l’argent qu’il y avait à la maison. Un matin, il la menaça, et disparut pendant toute la journée. Elle pleura, car cette chère Assunta avait pour le misérable un cœur de mère. Le soir vint, elle l’attendît sans se coucher. Lorsque à onze heures il rentra avec deux de ses amis, compagnons ordinaires de toutes ses folies, alors elle lui tendit les bras ; mais eux s’emparèrent d’elle, et l’un des trois, je tremble que ce ne soit cet infernal enfant, l’un des trois s’écria :

— Jouons à la question, et il faudra bien qu’elle avoue où est son argent.

Justement le voisin Wasilio était à Bastia ; sa femme seule était restée à la maison. Nul, excepté elle, ne pouvait ni voir ni entendre ce qui se passait chez ma sœur.