Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/153

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Or, le vague, c’est le doute, et, dit le sage, dans le doute abstiens-toi.

— Ce qui signifie, reprit Monte-Cristo, que si la maison Thomson et French est disposée à faire des folies, la maison Danglars ne l’est pas à suivre son exemple.

— Comment cela, monsieur le comte ?

— Oui, sans doute ; MM. Thomson et French font les affaires sans chiffres ; mais M. Danglars a une limite aux siennes ; c’est un homme sage, comme il le disait tout à l’heure.

— Monsieur, répondit orgueilleusement le banquier, personne n’a encore compté avec ma caisse.

— Alors, répondit froidement Monte-Cristo, il paraît que c’est moi qui commencerai.

— Qui vous dit cela ?

— Les explications que vous me demandez, monsieur, et qui ressemblent fort à des hésitations.

Danglars se mordit les lèvres ; c’était la seconde fois qu’il était battu par cet homme et cette fois sur un terrain qui était le sien. Sa politesse railleuse n’était qu’affectée, et touchait à cet extrême si voisin qui est l’impertinence.

Monte-Cristo, au contraire, souriait de la meilleure grâce du monde, et possédait, quand il le voulait, un certain air naïf qui lui donnait bien des avantages.

— Enfin, monsieur, dit Danglars après un moment de silence, je vais essayer de me faire comprendre en vous priant de fixer vous-même la somme que vous comptez toucher chez moi.

— Mais, monsieur, reprit Monte-Cristo décidé à ne pas perdre un pouce de terrain dans la discussion, si j’ai demandé un crédit illimité sur vous, c’est que je ne savais justement pas de quelles sommes j’aurais besoin.