Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/259

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la parole à mon ami Morcerf ; arrangez-vous avec lui, cela ne me regarde plus.

— Un nabab ne m’eût certainement pas envoyé une paire de chevaux de trente mille francs, avec quatre diamants aux oreilles, de cinq mille francs chacun.

— Oh ! les diamants, dit en riant Morcerf, c’est sa manie. Je crois que, pareil à Potemkin, il en a toujours dans ses poches, et qu’il en sème sur son chemin comme le petit Poucet faisait de ses cailloux.

— Il aura trouvé quelque mine, dit Mme Danglars ; vous savez qu’il a un crédit illimité sur la maison du baron ?

— Non, je ne le savais pas, répondit Albert, mais cela doit être.

— Et qu’il a annoncé à M. Danglars qu’il comptait rester un an à Paris et y dépenser six millions ?

— C’est le schah de Perse qui voyage incognito.

— Et cette femme, monsieur Lucien, dit Eugénie, avez-vous remarqué comme elle est belle ?

— En vérité, mademoiselle, je ne connais que vous pour faire si bonne justice aux personnes de votre sexe.

Lucien approcha son lorgnon de son œil.

— Charmante ! dit-il.

— Et cette femme, M. de Morcerf sait-il qui elle est ?

— Mademoiselle, dit Albert, répondant à cette interpellation presque directe, je le sais à peu près, comme tout ce qui regarde le personnage mystérieux dont nous nous occupons. Cette femme est une Grecque.

— Cela se voit facilement à son costume, et vous ne m’apprenez là que ce que toute la salle sait déjà comme nous.

— Je suis fâché, dit Morcerf, d’être un cicerone si ignorant, mais je dois avouer que là se bornent mes