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Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/88

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— À quelle place ?

— À la place même où il est tombé.

— Mon cher monsieur Bertuccio, dit Monte-Cristo en riant, revenez à vous, je vous y engage ; nous ne sommes pas ici à Sartène ou à Corte. Ceci n’est point un maquis, mais un jardin anglais, mal entretenu, j’en conviens, mais qu’il ne faut pas calomnier pour cela.

— Monsieur, ne restez pas là ! ne restez pas là ! je vous en supplie.

— Je crois que vous devenez fou, maître Bertuccio, dit froidement le comte ; si cela est, prévenez-moi, car je vous ferai enfermer dans quelque maison de santé avant qu’il n’arrive un malheur.

— Hélas ! Excellence, dit Bertuccio en secouant la tête et en joignant les mains avec une attitude qui eût fait rire le comte, si des pensées d’un intérêt supérieur ne l’eussent captivé en ce moment et rendu fort attentif aux moindres expansions de cette conscience timorée, hélas ! Excellence, le malheur est arrivé.

— Monsieur Bertuccio, dit le comte, je suis fort aise de vous dire que, tout en gesticulant, vous vous tordez les bras, et que vous roulez des yeux comme un possédé du corps duquel le diable ne veut pas sortir ; or, j’ai presque toujours remarqué que le diable le plus entêté à rester à son poste, c’est un secret. Je vous savais Corse, je vous savais sombre et ruminant toujours quelque vieille histoire de vendetta, et je vous passais cela en Italie, parce qu’en Italie ces sortes de choses sont de mise, mais en France on trouve généralement l’assassinat de fort mauvais goût : il y a des gendarmes qui s’en occupent, des juges qui le condamnent et des échafauds qui le vengent.

Bertuccio joignit les mains et, comme en exécutant