m’avait tant parlé, qui ne redoute rien, elle, et je me présentai chez le procureur du roi.
— Et ce procureur du roi se nommait Villefort ? demanda négligemment Monte-Cristo.
— Oui, Excellence : il venait de Marseille, où il avait été substitut. Son zèle lui avait valu de l’avancement. Il était un des premiers, disait-on, qui eussent annoncé au gouvernement le débarquement de l’île d’Elbe.
— Donc, reprit Monte-Cristo, vous vous présentâtes chez lui.
— « Monsieur, lui dis-je, mon frère a été assassiné hier dans les rues de Nîmes, je ne sais point par qui, mais c’est votre mission de le savoir. Vous êtes ici chef de la justice, et c’est à la justice de venger ceux qu’elle n’a pas su défendre.
— « Et qu’était votre frère ? demanda le procureur du roi.
— « Lieutenant au bataillon corse.
— « Un soldat de l’usurpateur, alors ?
— « Un soldat des armées françaises.
— « Eh bien, répliqua-t-il, il s’est servi de l’épée et il a péri par l’épée.
— « Vous vous trompez, monsieur ; il a péri par le poignard.
— « Que voulez-vous que j’y fasse ? répondit le magistrat.
— « Mais je vous l’ai dit : je veux que vous le vengiez.
— « Et de qui ?
— « De ses assassins.
— « Est-ce que je les connais, moi ?
— « Faites-les chercher.
— « Pourquoi faire ? Votre frère aura eu quelque