Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/106

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tenir un récit à peu près exact de ce qui s’était passé entre son fils adoptif et Mlle Riouffe.

Marius restait devant lui pâle et tremblant comme un coupable devant son juge ; son regard ne pouvait soutenir l’éclat qu’avaient pris les prunelles grises et atones des yeux de son parrain.

– Eh ! tron de l’air ! s’écria ce dernier, je le disais bien, lorsque l’on sent la bouillabaisse, c’est que le poisson n’est pas loin ; du moment que j’ai vu qu’une affaire qu’il était si simple de terminer prenait une telle tournure, je pouvais faire serment qu’une femelle s’en était mêlée ! Ah ! tu t’es laissé séduire par cette fillette qui n’est peut-être pas plus sa sœur que la mienne. Coquin de sort ! quelque gueuse à laquelle il a fait accepter ce rôle pour se moquer de toi, comme il se moque de moi !

– N’en croyez rien, père, fit Marius, auquel son amour naissant prêtait déjà l’audace de lutter contre le redouté M. Coumbes ; Mlle Riouffe est une jeune personne honnête. Si vous l’aviez vue comme moi dans son bureau, au milieu de ses commis ; si vous l’aviez entendue…

– Tais-toi, que je te dis, tais-toi, ou je te chasse. C’est une comédie que l’on veut jouer à mes dépens et dans laquelle tu leur auras servi de compère. Je gagerais que, s’ils veulent venir ce soir à la maison, c’est pour me régaler de quelque méchante plaisan-