Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/123

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étaient remplacées avec une prodigalité qui ne permettait pas de s’apercevoir de cet accident.

Le spectacle de cette prospérité inouïe blessait M. Coumbes aussi cruellement que les mauvaises plaisanteries de Jean Riouffe et de ses compagnons avaient pu le faire. Il essaya de lutter contre ce qu’il nommait une révoltante partialité de la nature ; il multiplia les arrosements ; il fit plantations sur plantations ; il se livra à des dépenses que lui-même caractérisait d’insensées ; mais, soit qu’il s’y fût pris trop tard, soit par toute autre raison inhérente au sol, rien ne lui réussit, et le clos de ses voisins, qui attestait son infortune, perpétua son aversion pour eux. Il détournait la tête lorsque ses regards rencontraient les cimes verdoyantes des arbustes qui dépassaient les murailles ; lui en parler provoquait chez lui une attaque de nerfs. Malheureusement, cette splendeur horticole trouvait moyen de se révéler encore : la brise de mer, en passant au-dessus de l’habitation de Riouffe, se chargeait des parfums des roses, des tubéreuses, des héliotropes, des œillets, des jasmins qui en garnissaient les élégantes corbeilles, et les apportait fidèlement à M. Coumbes. Malgré le mépris que celui-ci nourrissait pour ces cultures frivoles, ce témoignage d’une supériorité écrasante achevait de l’exaspérer ; il finit, comme tous les envieux, par dédaigner ce qui, pendant