Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/260

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de Montredon à Marseille. Chemin faisant, elle demanda à ceux qu’elle rencontrait le chemin de la prison, et, en la voyant ainsi pâle, égarée, avec ses cheveux nuancés de mèches grises qui s’échappaient de son bonnet et flottaient autour de son visage, les passants durent supposer qu’elle avait elle-même commis quelque crime.

La secousse qu’avait reçue Millette, en affaiblissant son cerveau, l’avait disposée à cette espèce de folie douce que l’on appelle la monomanie, monomanie concentrée tout entière sur son fils.

Elle s’était demandé d’abord s’il ne lui serait pas possible d’embrasser son enfant, et immédiatement elle était arrivée à la conviction qu’elle allait le voir. Aussi, lorsqu’elle eut sonné à la porte de la maison de détention, lorsque cette porte se fut ouverte devant elle, elle en franchit le seuil avec tant d’assurance, que le concierge, qui était accouru, dut employer la force pour la repousser au dehors. Il lui apprit qu’avec un laissez-passer du procureur général, il était permis de visiter les prisonniers, mais que, Marius étant au secret, cette faveur ne pouvait lui être accordée. Millette ne l’écoutait pas ; elle était absorbée par la contemplation de ces murs noirs et épais, de ces portes de fer, de ces grilles, de ces chaînes, de ces verrous, de ces hommes armés qui veillaient à la