Page:Dumas - Le Fils du forçat.djvu/47

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Il est vrai que, pendant les dix-sept ans que nous venons de franchir, l’existence de ce personnage n’eût offert qu’un médiocre intérêt à nos lecteurs.

Nous voulons parler de l’enfant de Millette et de Pierre Manas.

Il s’appelait Marius comme nombre de Marseillais. C’est ainsi que la reconnaissance des habitants de la vieille Marseille perpétue le souvenir du héros qui délivra leur pays de l’invasion des Cimbres ; touchant exemple, qui les recommande encore à l’admiration de ceux qu’ils nomment les Français. Il s’appelait donc Marius.

À l’époque où nous voilà parvenus, c’était, dans toute la force du mot, un beau garçon, un de ces jeunes gens que les femmes ne rencontrent pas sans redresser la tête, comme un cheval au bruit de la trompette.

Nous laisserons nos lectrices se tracer elles-mêmes le portrait de Marius à leur guise, en suivant leurs goûts particuliers, en leur demandant d’avance pardon si, dans la suite de cette narration, la vérité nous oblige à contrarier des prédilections auxquelles nous cherchons à complaire en ce moment.

La pauvre Millette adorait son enfant ; elle avait pour cela une foule de raisons, dont la meilleure était que, si naturel que fût ce sentiment, elle se trouvait forcée de le contraindre.