Page:Dumas - Le Meneur de loups (1868).djvu/287

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– Mais, maintenant, reprit Thibault, tout est fini et vous ne m’aimez plus ?

– Thibault, répondit Agnelette, je ne vous aime plus, parce que je ne dois plus vous aimer. Mais on ne chasse point comme on le voudrait sa première affection.

– Agnelette ! s’écria Thibault tout frissonnant, prenez garde à ce que vous allez dire !

– Pourquoi, dit l’enfant en secouant naïvement la tête, pourquoi prendrais-je garde à ce que je vais dire, puisque je ne dirai que la vérité ? Le jour où vous m’avez dit que vous vouliez me prendre pour femme, je vous ai cru, Thibault ; car à quoi vous eût servi de me mentir au moment où je venais de vous rendre un service ? Puis, plus tard, je vous ai rencontré, je ne vous cherchais pas ; vous êtes venu à moi, vous m’avez dit des paroles d’amour, vous m’avez reparlé le premier de la promesse que vous m’aviez faite. Ce n’est point encore ma faute, Thibault, si j’ai eu peur de cette bague que vous portiez au doigt et qui, assez grande pour vous, chose horrible ! s’est trouvée trop petite pour moi.

– Cette bague, dit Thibault, voulez-vous que je ne la porte plus ? Voulez-vous que je la jette ?

Et il essaya de la tirer de son doigt.

Mais, de même que la bague avait été trop petite pour entrer au doigt d’Agnelette, elle fut trop petite pour sortir du doigt de Thibault.

Il eut beau redoubler ses efforts, essayer de la faire sortir avec ses dents : la bague semblait rivée à son doigt pour l’éternité.

Thibault vit bien qu’il fallait renoncer à se séparer de cette bague, que c’était le gage du pacte passé entre lui et le loup noir.

Il laissa, en poussant un soupir, retomber ses bras près de lui avec découragement.