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OTHON L’ARCHER

ami contre lequel il avait trop souvent essayé ses jeunes forces pour le craindre. Il plongea donc au plus profond, nagea sous l’eau tant que sa respiration le lui permit, et, lorsqu’il reparut à sa surface pour reprendre haleine, la barque était si éloignée et la nuit si noire, que les gardes qui l’accompagnaient purent croire qu’il était resté englouti dans le fleuve.

Othon se hâta de gagner la rive. La nuit était froide, ses habits étaient ruisselants, il avait besoin d’un feu et d’un lit. Il se dirigea donc vers la première maison dont il vit les fenêtres briller dans l’ombre, se présenta comme un voyageur égaré, et, comme il était impossible de reconnaître s’il était mouillé par la pluie du ciel ou par l’eau du fleuve, il n’excita aucun soupçon, et l’hospitalité lui fut accordée avec toute la franchise et la discrétion allemandes.

Le lendemain, il partit au jour et se dirigea sur Cologne. C’était le saint jour du dimanche, et, comme il y entrait à l’heure de la messe, il vit chacun se diriger vers l’église. Il suivit la foule ; car lui aussi avait à prier Dieu… d’abord pour son père à cause de l’erreur et de l’isolement dans lesquels il l’avait laissé… pour sa mère enfermée dans un monastère… enfin pour lui, libre, mais sans appui et perdu dans ce monde immense qui ne lui avait encore montré pour tout horizon que celui du château natal. Cependant, il se cacha derrière une colonne pour faire sa prière ; si près de Godesberg, il