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OTHON L’ARCHER

d’adresse était à peine croyable pour eux-mêmes ; quant à Othon, qui s’était arrêté pour juger de l’effet du coup, à peine eut-il vu tomber l’animal, qu’il se remit en marche sans paraître remarquer l’étonnement de ses compagnons. Arrivé au héron, il arracha de son cou ces plumes fines et élégantes qui forment une aigrette naturelle, et les attacha à son bonnet. Quant aux archers, ils avaient compté la distance : l’oiseau était tombé à trois cent vingt pas.

Cette fois, l’admiration n’avait point éclaté en applaudissements ; les archers s’étaient regardés les uns les autres, étonnés d’une telle preuve d’adresse ; puis ils avaient compté les pas, comme nous l’avons dit, et, lorsque Othon avait eu fini d’orner sa toque du bouquet de plumes si miraculeusement acquis, Frantz et Hermann, les deux archers qui avaient tiré avant lui, lui avaient tendu la main, mais avec un sentiment de déférence qui indiquait que, non seulement ils le reconnaissaient pour leur camarade, mais encore pour leur maître.

La troupe voyageuse, qui ne s’était arrêtée à Woringen que pour déjeuner, arriva vers les quatre heures du soir, à Neufs. On dîna en toute hâte, car, à trois lieues de Neufs, était l’église de Roche, près de laquelle de religieux archers ne pouvaient passer sans y faire un pèlerinage. Othon, qui avait adopté la vie et les habitudes de ses nouveaux compagnons, les suivit