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OTHON L’ARCHER

pour lui mourir que vivre, et voir sa fille unique souffrir éternellement une souffrance pareille à celle qu’elle éprouvait à cette heure.

Au moment où le prince relevait Héléna et la pressait sur son cœur, on entendit le défi que d’heure en heure faisait retentir le comte de Ravenstein. Le père et la fille tressaillirent en même temps et comme frappés du même coup. Un silence de mort succéda à ce bruit guerrier. Mais, cette fois, le silence fut court ; le son d’un cor répondit à l’appel qui venait d’être fait. Le prince et Héléna tressaillirent de nouveau, mais de joie. Il leur arrivait un défenseur.

Tous deux montèrent au balcon de la princesse Béatrix, pour voir, de quel côté leur arrivait ce secours inespéré ; et cela leur fut chose facile, car tous les bras et tous les yeux étaient tendus vers la même direction. Un chevalier, armé de toutes pièces et visière baissée, descendait le Rhin dans une barque, ayant à ses côtés son écuyer, armé comme lui. Son cheval de guerre était à la proue, tout couvert de fer comme son maître, et répondait par des hennissements au double appel guerrier qu’il venait d’entendre. À mesure qu’il avançait, on pouvait distinguer ses armes, qui étaient de gueules à un cygne d’argent. Héléna ne revenait pas de sa surprise. Rodolphe d’Alost avait-il entendu ses prières, et un défenseur surnaturel renouvelait-il pour elle le miracle que Dieu avait fait en faveur de la princesse Béatrix ?