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LES FRÈRES CORSES

— Est celui que Bonaparte portait à la bataille des Pyramides.

— Sans doute, il est entré dans votre famille de la même manière que le poignard et l’épée ?

— Absolument. Après la bataille, Bonaparte donna l’ordre à mon grand-père, officier dans les guides, de charger, avec une cinquantaine d’hommes, un noyau de mamelucks qui tenaient encore autour d’un chef blessé. Mon grand-père obéit, dispersa les mameluks et ramena le chef au premier consul. Mais, lorsqu’il voulut rengainer, la lame de son sabre était tellement hachée par les damas des mamelucks, qu’elle ne put jamais rentrer au fourreau. Mon grand-père alors jeta loin de lui sabre et fourreau, comme devenus inutiles ; ce que voyant Bonaparte, il lui donna le sien.

— Mais, dis-je, à votre place, j’aimerais autant avoir le sabre de mon grand-père, tout haché qu’il était, que celui du général en chef, tout intact qu’il s’est conservé.

— Aussi regardez en face et vous le trouverez. Le premier consul le ramassa, fit incruster à la poignée le diamant que vous y voyez, et le renvoya à ma famille avec l’inscription que vous pouvez lire sur la lame.

Effectivement, entre les deux fenêtres, à moitié sorti du fourreau où il ne pouvait plus rentrer, pendait le sabre, haché et tordu, avec cette simple inscription

Bataille des Pyramides, 21 juillet 1798.