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LES FRÈRES CORSES

— Prenons ce sentier.

Lucien s’engagea le premier à travers un petit bois de chênes verts dans lequel je le suivis.

Diamante marchait à cinquante ou soixante pas de nous, battant le bois à droite et à gauche, et, de temps en temps, revenant par le sentier, remuant gaiement la queue pour nous annoncer que nous pouvions, sans danger et confiants dans son instinct, continuer tranquillement notre route.

On voyait que, comme les chevaux à deux fins de ces demi-fashionables, agents de change le matin, lions le soir, et qui veulent à la fois une bête de selle et de cabriolet, Diamante était dressé à chasser le bipède et le quadrupède, le bandit et le sanglier.

Pour n’avoir pas l’air d’être tout à fait étranger aux mœurs corses, je fis part de mon observation à Lucien.

— Vous vous trompez, dit-il ; Diamante chasse effectivement à la fois l’homme et l’animal ; mais l’homme qu’il chasse n’est point le bandit, c’est la triple race du gendarme, du voltigeur et du volontaire.

— Comment, demandai-je, Diamante est donc un chien de bandit ?

— Comme vous le dites. Diamante appartenait à un Orlandi, à qui j’envoyais quelquefois, dans la campagne, du pain, de la poudre, des balles, les différentes choses enfin dont un bandit a besoin. Il a été tué par un Colona, et j’ai reçu le lendemain son chien, qui, ayant